Edgar Morin, 99 ans, écrit en ce début 2021 : « Nous voyons aujourd’hui s’installer les éléments d’un totalitarisme. Celui-ci n’a plus rien à voir avec celui du siècle dernier. Mais nous avons tous les moyens de surveillance de drones, de téléphones portables, de reconnaissance faciale. Il y a tous les moyens pour surgir un totalitarisme de surveillance. »
Le constat est clair. Les technologies numériques permettent de suivre les déplacements, de connaître les dépenses effectuées à la date et au lieu près, d’enregistrer les conversations si nécessaire, de surveiller les rues. Plus rien n’a de secret pour la technostructure qui impose règles, normes et décrets. Quant à l’intelligence artificielle, elle permet de connaître les pensées et les désirs de chacun et leurs opinions politiques. Tout ce qu’on dit, écrit ou commente sur les réseaux sociaux peut être enregistré, analysé et stocké.
Ainsi, grâce à la pandémie Covid-19, les champions du numérique ont pu tester, avec la bienveillance de certains gouvernements, des techniques pour limiter la propagation de la maladie. Comment ? par identification, géolocalisation et rapprochement des individus ayant été en contact avec une personne infectée au moyen d’une application présente dans les smartphones. Sans la justification d’un souci sanitaire il aurait été impossible pour un gouvernement démocratique d’imposer un tel système.
Pour Edgard Snowden, les gouvernements utilisent la pandémie pour construire une « architecture de l’oppression » de la surveillance : « Croyez-vous vraiment que lorsque la première vague, puis la deuxième vague, et la 16ème vague du coronavirus seront un souvenir oublié depuis longtemps, ces capacités ne seront pas conservées ? Peu importe la façon dont il est utilisé, ce qui est construit est l’architecture de l’oppression. »
Et si un gouvernement craint la difficulté d’obtenir l’adhésion de ses citoyens à télécharger ce type d’application, il suffira d’exiger qu’Apple ou Google incluent la recherche de contact dans les mises à jour de leurs systèmes d’exploitation (IOS ou Android).
Et Snowden conclut : « Alors que l’autoritarisme se répand, que les lois d’urgence prolifèrent, que nous sacrifions nos droits, nous sacrifions aussi notre capacité à arrêter le glissement vers un monde moins libéral et moins libre. »
Le processus de surveillance se met en place en trois temps :
- on crée un problème choquant, inquiétant ou on profite de son apparition pour alerter la population sur un danger majeur. Les pandémies sont idéales. Elles touchent à la santé, donc à la vie. Les peuples occidentaux voudraient bien se croire immortels, ils ne sont plus préparés à la fatalité inéluctable de la fin de la vie, c’est la panique.
- le gouvernement a la solution : il faut confiner la population car les médicaments efficaces n’existent pas. Mais rien n’y fait, la pandémie ralentit mais ne s’arrête pas. On annonce un vaccin dont on n’est pas certain qu’il immunise totalement ni pour combien de temps. En attendant, le meilleur moyen est de tracer tous les citoyens pour isoler les cas positifs et espérer reprendre une vie normale.
- le peuple accepte car ça permet d’éviter les confinements qui sont anxiogènes et induisent des pathologies psychiques et détruisent l’économie. Les médias relaient en continu l’information et, s’il faut, on prive de certaines libertés ceux qui n’ont pas téléchargés l’application magique pour leur forcer la main. Enfin, on maintient la surveillance car les épidémies peuvent revenir à tout moment. Gouverner c’est prévoir. On s’occupe de vous !