La société de surconsommation

D’un point de vue marketing les achats effectués ou les pages lues sur des sites proposant toute sorte de produits, permettent non seulement de savoir à quel type de produit chacun aspire mais, encore mieux, d’anticiper les évolutions d’achat, les désirs et les besoins à venir de chaque consommateur.

Si encore ces connaissances de chacun servaient à diminuer le temps publicitaire, pourquoi pas ? Mais il n’en est rien. Le marketing de l’interruption, non seulement ne s’est pas arrêté, mais il s’est amplifié. Il devait être remplacé par le marketing de l’adhésion : on vous propose de vous présenter un produit après avoir obtenu votre permission. Pour Seth Godin, son créateur, vendre consiste à obtenir préalablement l’autorisation du consommateur. On y parvient en engageant le dialogue avec lui. Une relation à double sens qui suppose la participation de l’un et de l’autre.

Au lieu de se contenter d’interrompre une émission télévisée en « balançant » un spot ou de forcer la porte du consommateur avec un courrier ou un appel téléphonique « surprise », le spécialiste du marketing cherche à convaincre le client de participer volontairement à une relation commerciale. Peut-être que celui-ci consent sans contrepartie, juste pour en savoir plus sur une certaine catégorie de produits. Dans d’autres cas, on lui propose une récompense – monétaire ou autre – en échange de sa permission.

Le matraquage publicitaire n’est plus limité à une information nécessaire sur l’offre de produits, mais est devenu un bourrage de crâne effrayant qui tient plus de la propagande obscène et intrusive. Le marketing de l’intrusion ne s’est pas ralenti, chaque consommateur recevant un million de messages par an.

Les fournisseurs de produits devant toujours vendre plus, il faut que le consommateur ne se contente pas d’acheter le nécessaire, mais il faut l’encourager à acheter le superflu. Et comme on dit qu’il est plus plaisant d’acheter un beau vêtement que son paquet de lessive, le marketing joue sur les émotions et l’image du produit qui est censé valoriser l’individu vis à vis de son milieu social.

Dans mon livre « C’est dans le roman », je traite du marketing des produits de luxe à l’occasion d’un dialogue entre Laurence, l’héroïne du livre, et John, cadre supérieur d’une société de parfum :

« Comment êtes-vous arrivée dans ce milieu de la parfumerie, Laurence ? »

Elle se pencha vers lui comme pour lui dévoiler un secret et répondit : « Peut-être poussée par une certaine perversité. » Étonnement de ces Messieurs. 

« Oui, en fait, les produits de luxe deviennent une nécessité pour tout le monde. Ils ne sont plus réservés qu’aux riches. Il faut arriver à maintenir leur attirance de façon à ce que le consommateur ne puisse plus s’en passer. Il finit par penser que ces produits font partie de sa vie, de sa personnalité, de son aura. Le succès de leur vie sociale va en partie en dépendre. Donc, c’est amusant de participer à cette œuvre d’influence. Vous ne trouvez pas ? » 

John, ne voulant pas rester dans la posture qui pourrait laisser supposer que tout cet univers n’existât que pour le seul bénéfice de ceux qui en tirent profit, répondit : 

« Mais ma chère vous oubliez la nature humaine et ses pulsions ? Posez-vous la question. Pourquoi tous ces consommateurs viennent dans nos boutiques acheter nos produits ? Pour une raison simple : il est bien plus jubilatoire d’acheter un parfum qu’un paquet de lessive au super marché. Il y a une course à l’évasion d’un quotidien pas toujours agréable, fatiguant, stressant, alors il faut bien une alternative. On ne peut pas en vouloir aux gens de rechercher des instants de gaieté, de joie, de réjouissance. Prenez les voyages. Cette évasion pour « se laver la tête », encore une expression qui veut bien dire que l’on a besoin de changer d’air, de voir autre chose que notre quotidien. D’ailleurs les professionnels du tourisme l’ont bien compris. Ils ne parlent plus de voyage mais d’expérience. On va ailleurs pour découvrir un spot de surf ou des cités perdues, des villes différentes ou rencontrer des gens qui ne vivent pas comme nous. Donc tout ça pour dire que je ne vois pas de perversité dans notre métier. »

Les pandémies vont-elles remettre en question la surconsommation ou, au contraire, le désir de tout acheter va reprendre de plus bel après les privations des confinements ?

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